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Nacre erre

J'ai peur d'user mon lit rien qu'en dormant dedans J'ai peur d'user mes vêtements en les portant J'ai peur d'user mon canap' en m'y asseyant J'ai peur d'user mes peluches en les câlinant J'ai peur d'user mon corps en y vivant, vivant

J'ai peur d'user ton coeur, mon amour, en t'aimant


J'aurais adoré trouver la perle rare, l'âme soeur

Être étrange et pataud aux mêmes aspirations que moi

Pieds nus parmi les épines, nous aurions vogué sans loi

Sa main glissée dans la mienne, cheminant le long des heures

Connivence toute naturelle, convergence des idéaux

Son rire transperçant la nuit, sa peau comme un doux murmure

J'aurais donné mes espoirs, mon passé et mon futur

Pour rencontrer son présent et me jeter dans ses flots


Mais l'univers jaloux garde tous ses mystères

Il m'enferme et me broie sous les assauts doucereux

Des années et des lieues qui s'enchaînent et m'entraînent

Sans son sourire charmant je me perds dans mes pas

Seul, éperdu, tremblant, je crie, pleure et me noie

Il n'existe pas sur Terre d'acolyte pour mon âme

J'donnerais d'la voix pour à peu près n'importe qui

Mais je ne donnerais ma voix pour personne, non

Ma vie, sans souci, mais ma voix, ça, y a pas moy'


J'perds mon coeur et mon âme dans tes yeux

J'perds mes peurs et mes larmes dans tes bras J'perds toutes mes barrières dans ton sourire

J'perds même mes souvenirs dans tes étreintes


L'aube tord et déchire les songes trop fruités

La lumière vient briser la douceur d'un été

Dans la nuit de mon coeur s'insinue la douleur

Le vent porte aux étoiles ton sourire, ton odeur

Le trouble enfle et m'écorche pour ouvrir mes paupières

Ce matin je suis mort, c'était peut-être hier


J'suis désolé d'être nul, j'suis désolé d'être moi

J'suis désolé d'être si terne et si plat

J'suis désolé d'être con, j'suis désolé d'être froid

J'suis désolé d'avoir perdu tout ce qui faisait "moi"

J'suis désolé d'être rien, j'suis désolé d'être borné

J'suis désolé d'être si triste et mort

J'suis désolé d'avoir mal, j'suis désolé d'avoir peur

J'suis désolé d'être distant et maladroit


Ma mémoire me torture, envahissante et belle

Instants sacrés ou creux figés dans l'éternel

Capacités ou voeux formant un archipel

J'avais la plume, la voix, le corps et la cervelle

Mais mordu par les ans mon talent s'est fêlé

Mon chant ne vaut plus rien, surtout il a perdu

Tout ce qu'il a pu être, son essence a fondu

De lui il ne reste qu'une ombre craquelée


L'ombre naît et s'allonge, s'enflamme et étincelle

Tu souris sous le poids des tempêtes furieuses

Le timbre de ton cri coule et creuse ta vie

Tu ris malgré la peur, la passion, la douleur

Tu t'envoles, ravi, vers les horizons bleus

Tu mets de la musique au bout de tes doigts fins


Je rêve chaque jour de son sourire

J'invente un monde pour nos voyages

Je me souviens de nos images

Hélas il faut toujours partir


Au matin mes angoisses remplacent le satin

De sa peau sur mes lèvres et crèvent mon repos

Le jour passe, rêve haï, envahit son espace

Me laissant épuisé, impuissant et lassé

Si la nuit m'émerveille, le réveil, lui, m'ennuie

Le bonheur se délite dans mon lit de bonne heure

Notre réalité meurt alitée et autre

Perforant les débris de mon esprit mourant


Mes yeux sombrent dans l'éther, mon coeur paniqué se terre

Aperçu d'éternité, la mort pour écrin amer

Avant-goût d'immensité, mes doigts se fondent dans la mer

Et mon avenir s'enterre, mon ventre devient cratère


J'ai peur d'user mon lit rien qu'en dormant dedans J'ai peur d'user mes vêtements en les portant J'ai peur d'user mon canap' en m'y asseyant J'ai peur d'user mes peluches en les câlinant J'ai peur d'user mon corps en y vivant

J'ai peur d'user ton coeur en t'aimant



8 mars-août-septembre (oui le 8 de chaque mois).

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