Les diplômes, c'est crucial dans la vie, on peut vraiment pas faire sans, et ça a toujours une utilité. Du moins je suppose, puisque les gens ont l'air de le penser.
Plus sérieusement, j'ai envie d'amener les gens à se questionner là-dessus. Parce que justement, les diplômes, c'est pas toujours utile (on pourrait carrément dire qu'ils ne le sont jamais, mais dans notre société capitaliste c'est un peu compliqué de s'en sortir sans, bref c'est un autre sujet), et surtout ça ne fait pas tout, et c'est pas le seul moyen d'avoir des connaissances.
Un diplôme, c'est la preuve que tu as fait des études. Les études, c'est cool (le système scolaire français, beaucoup moins), mais c'est pas le seul moyen d'apprendre. Et puis, même en faisant de longues études dans un domaine, on peut dire de la merde sur le sujet. Déjà parce que ça dépend du moment où on les fait, du domaine choisi, des profs qu'on a, de plein de choses extérieures à soi, et puis de l'investissement personnel, des capacités, etc. Les examens, on peut les rater à cause du stress, ou au contraire carburer alors que le reste du temps tout a foiré, c'est pas toujours représentatif. On peut tout oublier une fois hors des bancs de l'école, ou ne pas suivre ce qu'on a appris, ou ne pas se mettre à jour quand les connaissances du milieu évoluent. Donc oui, faire des études c'est utile, mais un diplôme n'est pas forcément gage de compétence.
Et une absence de diplôme n'est pas une preuve d'incompétence.
T'as un diplôme de politique ? T'as fait des études de politique ? Non ? Alors t'as pas le droit de parler de politique. T'as un diplôme de libraire ? T'as fait des études sur la gestion d'une bibliothèque ? Non ? Alors tu peux pas recommander des livres à tes potes. T'as un diplôme de cuisine ? T'as fait des études et/ou des stages dans le domaine ? Non ? Alors tu ne sais pas cuisiner. Absurde, non ?
C'est valable dans la majorité des domaines. Je pense même que c'est valable dans tous les domaines, parce que tout peut s'apprendre en soi, et pas forcément dans le cadre d'études officielles. J'veux dire, même chirurgien-ne, en soi, je suis sûr que si tu confies un-e apprenti-e à un-e chir qui en a déjà formé plusieurs, iel saura lui enseigner sans passer par un parcours officiel, et justement en 1v1 y a moyen que la transmission soit plus précise. Alors j'dis pas qu'il faut former les chir hors du parcours officiel là tout de suite comme ça sans orga, hein, mais juste, en soi ce métier aussi peut s'apprendre autrement, si on y met les moyens (je parle pas d'argent, j'aime pas l'argent et j'en vois toujours pas l'utilité). Bref, ça c'est pour un exemple extrême (j'aurais pu parler de physique quantique ou de trucs comme ça, mais tant que ça ne touche pas directement des humain-es la comparaison est moins pertinente).
L'histoire, la cuisine, les langues, la philo, la musique ou la géologie peuvent s'apprendre hors de l'école voire en autodidacte, et ça ne pose de problème à personne il me semble. Alors en quoi serait-ce aberrant que des personnes motivées, avec les ressources appropriées, engrangent suffisamment de connaissances sur des fonctionnements humains pour analyser leur propre fonctionnement et le comparer à des catégories psychiatriques ? Bon, on va pas parler ici de la pertinence des catégories psychiatriques, sinon on va se fâcher, vu sur quoi c'est basé. Mais si tu crois en ces catégories, tu peux entendre que des gens apprennent des choses dessus hors d'une fac dédiée, non ? Surtout que bon, si la parole des psy est la plus pertinente pour toi, ben iels sont nombreuxes à reconnaître que, oui, beaucoup de psychiatrisé-es connaissent très bien leurs troubles, sont capables d'en parler, et peuvent être qualifié-es d'expert-es de leur condition. Oui oui, même des psy le reconnaissent, même des psy soutiennent tout ça.
Alors, toi qui n'es pas psy, pourquoi tu veux absolument jouer le gatekeeping ?
Ouais, c'est vrai, on est pas psychiatres diplômé-es, on est parfois pas diplômé-es par la psychiatrie (je parle de diag), mais notre diplôme de fols, on l'a t'en fais pas. On a pas toujours les mots, pas toujours la capacité d'expliquer le raisonnement, pas toujours conscience des nombreux indices qui nous conduisent à la conclusion que toi et ton rire êtes comme nous. Des fois, on sait, et c'est tout.
La folie, c'est notre vie, on peut en parler. Certain-es peuvent le faire avec des mots, des lettres, d'autres avec leur corps ou leurs cris, des objets ou des mélodies, des sourires ou des agonies. La folie, c'est notre domaine d'expertise, notre quotidien et l'air qu'on respire, depuis la naissance ou depuis des années, avec ou sans diag. En quoi aurions-nous moins de légitimité à la décrire, que des gens qui l'étudient ?