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Des couteaux dans l'âme

Dernière mise à jour : 4 juil. 2023

Chaque petite imprécision, chaque petite incompréhension, chaque instant de flottement. Chaque sourire maquant de sympathie, chaque regard peu chaleureux, chaque air condescendant. Chaque geste rapide, chaque froncement de sourcil, chaque ton un peu sec. Chaque sourire moqueur, chaque jugement, chaque insulte. Ce qui te semble un détail insignifiant est une lame incandescente dans la fragile membrane de mon estime de moi. Une simple membrane, déchirée et si fine qu’on peut voir à travers. Chaque fois que quelqu’un m’ignore, me mégenre, me regarde bizarrement, je me sens comme un extraterrestre, comme une merde. Ce qui te semble évident peut être pour moi un vrai sac de noeuds, un problème insoluble, une idée insaisissable. Ce n’est pas que je sois stupide. Loin de là. Mon cerveau fonctionne très bien, il est juste un peu aléatoire. Ma mémoire est aléatoire, mes phobies sont aléatoires, mes réactions sont aléatoires, mes goûts sont aléatoires. Même la couleur de mes yeux est aléatoire. Le second degré, je le manie souvent, je le comprends souvent. Mais parfois, ça n’arrive pas jusqu’à mon cerveau, je sais pas, ça passe pas, c’est tout. Les blagues, même chose. Si tu me dis un truc tellement méchant que c’est évident que tu le penses pas, sache qu’il va s’infiltrer jusqu’au plus profond de mon esprit, et ronger, ronger, ronger. Si tu fais un sous-entendu que je suis pas certain de comprendre, même chose. Y a tellement de possibilités pour me faire culpabiliser. Et tu veux savoir le plus beau ? Ma famille le sait très bien, puisque c’est elle qui me l’a enseigné. Qui m’a enseigné à m’en vouloir de refuser un bonbon en disant que j’aimais pas ça, même si théoriquement c’était vrai, parce qu’au fond j’en avais envie, donc techniquement ça comptait comme un mensonge. Oui, depuis le CP, ça tourne en boucle dans ma tête. Alors imagine tout le reste. Ah oui, y en a, des choses qui me rongent. Depuis tant d’années. Et ces connards se sont pas gênés pour enfoncer le clou, pour remuer le couteau dans la plaie, pour verser du piment sur la chair à vif. La douleur. Le chantage affectif, inefficace mais toujours plus culpabilisant. La violence. Leur violence, et ma culpabilisation. Moi qui m’en voulais de leur violence. Depuis l’enfance. Maintenant c’est fini, ils ne veulent plus de moi parce qu’ils ont compris qu’ils ne pouvaient plus me manipuler, plus rien obtenir de moi. Parce que j’ai osé en parler. Parce que je n’ai pas accepté de laver le linge sale en famille. Parce que j’ai osé en parler, et pas juste à mes potes. J’ai osé témoigner. Et pour ça, pour eux, j’ai cessé d’exister. Enfin, après une dernière mesquinerie en témoignage. Donc je suis libre. Je suis libre de leurs magouilles, et prisonnier avec moi-même, mon sentiment de culpabilité et le reste. Je suis libre, et j’ai plus de joker. J’ai plus de solution de repli pour quand j’veux voir personne, quand je vais trop mal pour exister, quand je suis trop fatigué pour me balader. J’ai plus de soutien matériel pour ne pas mourir de faim, j’ai plus de vie là-bas. Et le pire, c’est que je les aime même pas. Je me sens coupable depuis des années de ne pas les aimer. J’imagine même pas dans quel état je serais si je les aimais. Tu peux pas savoir ce qu’ils ont balancé comme atrocités. Là, je suis très vexé de ne pas avoir eu le dernier mot. Mais à terme, c’est pas moi qui vais perdre. Parce que là où j’ai témoigné, ils ont déjà perdu. Et ils le savent. Bon, c’est quand même eux qui m’ont viré, et pas l’inverse, donc je resterai vexé. Hmouais, j’ai la rancune tenace, et la vexation aussi. Dans mon âme, il y a beaucoup de couteaux. Comment tu sais si quelqu’un te plaît ? Comment tu sais si tu plais à quelqu’un ? Imagine, quelqu’un te plaît, tu le lui dis, et tu lui plais pas. Comment survivre ? Au désespoir, à la panique, à la peine, à la honte ? Il s’appelait Fabien. Il s’appelle sûrement toujours comme ça. C’était la deuxième personne la plus intéressante de toute la maternelle. Et moi, j’étais le truc bizarre, l’anomalie. Un jour, il a dit qu’ouvrir manuellement les yeux de quelqu’un pouvait avoir des conséquences dramatiques. Pourquoi j’en parle ? Il l’a jamais su. Ni personne, d’ailleurs. Parce que j’avais déjà peur du rejet. Ou pire, de ne pas savoir quoi faire en cas de réciprocité. Oui, c’est pire, d’un côté. Bref, là je viens de confesser un crush, alors je vais me rouler en boule sus la couverture. Bonne nuit.


PS : Je rêve de voir une adaptation de la Légende du Roi Arthur à travers le prisme du polyamour explicite, assumé, accepté. Et de Dracula. Et de... De plein de choses


3 juin 2019.

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