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Crise

Ma vie va de mieux en mieux, moi de mal en pis

Je crie à l'intérieur, et je hurle et je pleure

Je m'effondre, en sursis, me noie dans les soucis

Souvenirs gangrénés par la couleur des heures

Dans le calme nouveau de mon appartement

Je fais face à l'ennui, au passé qui m'enchaîne

Les images violentes se succèdent, les amants

Dominent ma mémoire, la déchirent, la malmènent

Les amitiés futiles, gâchées, imaginées

Toile de fond de cette ère d'avant décrépitude

Esseulé dans la foule continuant à tourner

Pas le temps de penser, de voir ma solitude

Pas le temps d'm'arrêter pour regarder monter

Les larmes et les cris, les douleurs les regrets

Foncer à cent à l'heure, et toujours persister

Rebondir d'âme en âme, pour mourir en secret

Flotter de ville en ville ou bien de lit en lit

Perdre le temps, l'espace, dans un flou artistique

Détruire un avenir depuis longtemps pourri

Fondre mon être entier dans une vie mécanique

Arracher ma douleur à grands coups de douleurs

Brûler mes traumatismes à coups de traumatismes

Ouvrir mes bras graciles pour savoir la couleur

De cette chair fragile, plonger dans le mutisme

Le passé c'est aussi la famille et ses frasques

Des romans entiers que je pourrais rédiger

Y a matière à films glauques, les horreurs sous le masque

Mais c'est pas réaliste, trop le goût du danger

Personne n'y croirait, anecdotes improbables

Qui serait aussi con, quel enchaînement bizarre

C'est ma vie impossible, mon histoire véritable

Trop de coïncidences, de crasse, de risques, j'me marre

Tous ces animaux morts que je me remémore

Tous mes chers disparus, fugueurs invétérés

Trou dans l'coeur et dans l'corps, voix cassée crie trop fort

En silence, en silence, faut rien laisser filtrer

Dans le calme nouveau de mon appartement

Mon esprit submergé se retrouve envahi

Par une vie terminée qui broie mes hurlements

Tout remonte et m'aspire, tu as désobéi

Trop d'espace pour penser, pour spiraler à l'aise

A l'ombre d'un canapé, cul blasé et baisé

Coincé dans mes journées, ce quotidien qui m'pèse

Englué dans ma sueur, rêvant d'parfums boisés

Apathique, explosif, dans mon carcan brûlant

Immobilisé par une chiée d'douleurs chroniques

Les os qui veulent s'fracasser, les genoux branlants

Articulations mortes, tout est foutu, eh nique

Tout fout l'camp ça m'déglingue, imagine mon cerveau

Tu veux savoir c'qui craint, c'qui cloche ou c'qu'est détruit

Bon courage mon chaton, j'suis fêlé j'suis pas beau

J'suis pas sain, j'suis taré, j'suis dingue et fou j'le suis

Jusqu'au fond des orteils chaque parcelle d'mes entrailles

Une maladie mentale sur pattes, allez mate ça

Entonnoir sur le crâne, j'déraille, j'défaille, j'm'entaille

Et ça m'va c'est ma vie, j'vais pas m'prétendre forçat

J'voudrais juste me casser, me balader encore

Sur des chemins perdus, ployant sous l'sac à dos

Au hasard des sourires, en attendant la mort

A surfer sur ma voix, p't-êt' fumer des bédos

Pour croiser des badauds, me perdre dans des nuits froides

Discuter dans le noir sans savoir si l'type là

Va m'violer ou m'filer à bouffer d'ses mains roides

La vinasse à plein nez j'cracherai pas dans son plat

Mais dans quel monde tu vis pour connaître personne

Qui se soit évadé d'un HP, d'un hosto

Même ma grand-mère, t'sais quoi, daronne de ma daronne

Ouais la vieille décrépite, s'est échappée, poto

D'sa maison d'retraite, on l'a retrouvée dans l'ruisseau

Si on t'enferme, casse-toi, j'te laisserai pas tomber

J'veux pas m'faire interner mais j'forcerai tes barreaux

Pour te remettre sur tes pieds, dansera comme des teubés

J'veux pas penser, chialer, j'veux pas qu'ton regard m'salisse

Pourtant plus fort que nous y a ce point dans ma nuque

T'sais ce brouillard vicieux et cette odeur de pisse

Qui colle aux lèvres, aux yeux, ces enfoirés m'reluquent

J'sais qu'les autres me surveillent, j'sais qu'j'peux même pas m'cacher

Z'ont infiltré ma tête, j'étais encore minot

Ce sera là pour la vie, j'ai voulu m'arracher

Les veines, le coeur, les globes, c'te putain d'parano

Comment tu veux qu'j'men sorte, que j'sache si c'était vrai

Tout c'qu'on m'a raconté, tout c'qu'on m'a inculqué

C'qu'on m'a fait avaler à grand renfort d'couperet

Métaphorique peut-être, j'aurais voulu m'planquer

Quand tu vis avec eux y a nulle part où souffler

Ancré dans une époque j'ai voulu m'évader

J'ai cherché des sorties, j'voulais juste m'en aller

Fuir mon corps ou leur vie, y avait qui pour m'aider

Alors ouais aujourd'hui leur dieu j'm'en carre le cul

Pourtant il vit toujours en moi, il veille il rôde

Il envoie des décharges quand j'fais pas c'qu'est prévu

C'qu'on m'a appris gamin, tous les jours ça m'taraude

P't-êt' tout l'monde est putain d'mytho autour de moi

Et faut pas que je croie quoi qu'ce soit pasqu'au fond

Les autres me mentiront, parfois pendant des mois

L'univers est une fraude, j'en connais un rayon

La vérité existe pas chez ces enfoirés

Tout l'monde ment tout le temps et j'peux pas faire confiance

Nan à personne, jamais, même pas à moi, juré

Vu qu'ma mémoire, schlagos, c'est pire qu'dans mon enfance

Elle est aléatoire, autant qu'le reste tu sais

J'ai aucune idée d'si mes souvenirs sont vrais

C'est pas fiable rien n'est fiable, j'vois pas pourquoi j'essaie

J'croyais qu'fallait être clair, dans quel monde ça devrait

J'ai les méninges en vrac, les mots s'bousculent et craquent

J'ai oublié trop d'trucs, les dés étaient pipés

Le tri est impossible, l'effacement me traque

Submergé par le trac j'ai les souvenirs râpés

Y a pas qu'les miens en plus, j'sais pas quoi est à qui

Qui a fait quoi ou quand, comment, où et pourquoi

Et caetera et caetera, rien n'est acquis

J'dois pas croire j'dois pas voir, immobile rester coi

Rien croire pas confiance nan, jamais personne jamais

Rien que moi sous mon crâne, moi et toute cette marmaille

Rien que nous en vase clos, malgré c'qu'on nous promet

Ignorer l'extérieur protégé-es par l'émail

Immuable rempart contre leur réalité

On vendra chèrement notre peau, nos pensées

Est-ce que j'm'invente tout ça, est-ce que j'ai tout inventé

Tout rêvé tout construit, est-ce que ça fait des années

Qu'j'ai oublié d'me réveiller, d'ouvrir les yeux

Est-ce que j'ai tout inventé est-ce que tout est faux tout

Issu de mon esprit malade et pernicieux

Torture interne et morne, tentative de verrou

Est-ce que tout est dans ma tête est-ce que ça fait trop d'années

Qu'j'suis pas sorti d'ma nuit est-ce que j'ai tout inventé

Univers parallèle ou coma suranné

Jouet d'un être vicieux ou expérience ratée

Est-ce que j'ai un jour vécu est-ce que j'ai rêvé tout ça

Un cerveau maltraité réfugié dans les songes

Violence d'éternité, inverse et vice-versa

Est-ce que j'ai crée moi-même cet enfer qui me ronge

J'ai envie d'partir loin partir et pas revenir

J'ai envie d'me barrer et d'aller en concert

A l'autre bout du monde pour oublier l'avenir

Me taper dans l'pogo et fermer les paupières

Là où personne me connaît là où personne sait

Qui j'suis qui j'ai été ou c'que j'ai visité

Là où personne se soucie de tous mes excès

Mes regrets, mes succès, ma mort ou ma pureté

C'que j'ai fait c'que j'ferai j'ai envie d'me tirer

Et de pas être moi j'ai envie d'foutre en l'air

Tout c'que j'aime, en quoi j'crois, juste pour me marrer

J'ai envie de cramer ma peau sans huile solaire

De faire tout c'que j'aime pas et tout c'que je veux pas

J'ai envie de taper des trucs que j'veux pas prendre

J'ai envie d'voir jusqu'où j'peux aller vers l'trépas

Flirter avec la fin quitte à me faire descendre

J'ai envie de savoir c'que ça fait d'défoncer

Mon corps trop négligé, de déglinguer ma tronche

De planer sans filet me plonger dans la C

Respirer des horreurs à m'arracher les bronches

J'ai envie de cogner ma gueule de balader

Mes poings sur tout mon corps jusqu'à plus l'reconnaître

Jusqu'à être rouge et noir de partout et bader

Jusqu'à avoir des bleus qui saignent, putain d'mal-être

Pasque tapé trop fort des bleus noirs des bleus rouges

J'ai envie d'calciner ma chair mon sang d'brûler

Sous mes propres coups j'veux que sous ma peau ça bouge

Juste pour voir c'que ça fait j'veux plus savoir parler

J'veux avoir mal j'veux avoir mal j'veux m'déchirer

Jusqu'à plus savoir comment j'm'appelle quel âge j'ai

J'veux détruire mon histoire j'veux crever j'veux m'tirer

Je veux qu'on m'enterre dans mon habit noir de jais

Tout le monde m'abandonne ça dure depuis toujours

J'vois pas pourquoi ce serait différent aujourd'hui

Je déteste ma vie, pauvre vieux troubadour

Je déteste être obligé de vivre avec lui

Lui qu'est moi quelle horreur j'ai besoin d'pouvoir me fuir

Ça m'fait chier d'être coincé dans un univers terne

Cet ersatz de dépression m'poursuit pour me nuire

Je me terre dans ma crasse j'ai le moral en berne

En fait j'crois j'en ai ma claque de la dépression

Tout serait tellement plus simple et plus facile si

T'étais mort comme prévu y a des années voyons

Sur cette autoroute noire ou sous l'poids des soucis

Pauvre taré t'as trop mal mais personne peut t'aider

Fou à lier sans espoir t'as fui l'idolâtrie

Mais fais gaffe t'es toujours une proie pour les condés

Quel enfer ouais quelle pourriture la psychiatrie



9 septembre.

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